mercredi 26 février 2020

GUILLOIS Josselin, Louvre


Josselin Guillois | Editeur : Seuil (2019) | 256 pages | 18€


Une femme veut un enfant. Une adolescente regarde ses seins pousser. Une comédienne se fait avorter. Trois femmes qui interrogent leur lien viscéral à la vie et à leur condition, trois journaux intimes en prise avec la guerre. Chacune a partie liée avec un homme, Jacques Jaujard, directeur du musée du Louvre au moment où, en ce mois de septembre 1939, la France entre en guerre contre l'Allemagne. Marcelle, Carmen, Jeanne : chacune, à sa manière, joue son rôle dans le déménagement des collections du plus grand musée d'Europe. Car, devant l'avancée des troupes du Reich, Jaujard a décidé de vider le Louvre, et de le cacher. Ainsi La Joconde, la Vénus de Milo, les bijoux des pharaons, les peintures de Rubens, tout dans l'urgence quitte Paris incognito, chargé dans des camions à cochons, roulant phares éteints vers des châteaux lointains...


Mon avis 

Cuvée de la rentrée 2019, conseillé par mon libraire, un thème historique qui me plait bien ? Allez, on se lance. Et ... j'en suis ressortie un peu surprise. Sortie de ma zone de confort, je n'arrive pas à dire si j'ai aimé ou si j'aurais voulu autre chose. Non, c'est bête. Je pense que j'ai bien aimé ce roman au fur et à mesure de sa lecture. Et pour expliquer cela, rien de mieux que décrire un peu la structure du roman.

Louvre nous conte l'histoire des collections du Louvre de 1939 à 1945 dans un style très romancé. Josselin Guillois a choisi de la raconté à travers trois journaux intimes : celui de Marcelle Jaujard, de Carmen Leloup et de Jeanne Boitel. Ce sont trois femmes, à la vie et au caractère bien différents, mais qu'ont-elles en commun ? Que cherchent-elles au travers ces pages ? Un homme, une réponse dans la beauté de l'art, la quête de leur féminité ? C'est au travers des œuvres d'art, des peinture anciennes ou modernes qu'elles cherchent leur chemin, comme un fil rouge qui guide la lecture à la manière d'une exposition dans un musée tel que le Louvre. Ce sont trois voix féminines qui portent en elles le souci de préserver pour l'humanité ces œuvres. Trois témoignages qui s'appliquent à retranscrire une parenthèse de l'histoire, magnifique ou égoïste, romanesque ou bien réelle, en tout cas sublimée.

Le journal de Marcelle est celui qui m'a été le plus hermétique. Non pas à cause de l'écriture, simplifiée pour adopter un style un peu cru propre à un journal, mais sans doute parce qu'il frôle de très près une douce folie. Jusqu'où Marcelle est prête à s'enfoncer pour approcher ce rêve, ce désir d'enfant inassouvi ? A voir le sexe partout, on se demande si elle ne s'oublie pas trop facilement quitte à se perdre. Ce n'est plus le cas avec le journal de Carmen, jeune femme qui est guidée par la pensée magique que l'évolution de son corps décidera de l'avenir de la France. Désillusions douces-amères qui semblent la faire grandir, réfléchir et changer. Enfin, le journal de Jeanne, qui sera mon préféré, sans doute par cette passion déchirante et cette tension qu'il délivre. Car Jeanne n'est pas femme qui se cache derrière les autres, elle a la vue perçante des risques qu'elle prend en tentant de sauver les œuvres, Jacque en faisant partie. Je ne l'ai que d'autant plus appréciée. Après tous ces témoignages, un dernier petit rebondissement nous est apporté par un Jacques Jaujard, tel qu'imaginé par l'auteur de ce roman.

Ce roman m'inspire pour le chroniquer, je m'emballe. Je vais terminer avec ce dernier point. Si je m'attendais à un roman plus classique dans son approche, j'ai été surprise des nombreuses références à des œuvres de peintres connus. Le roman nous balade d'œuvre en œuvre avec une fluidité, telle qu'il serait tentant d'ouvrir un moteur de recherche pour les visualiser à défaut de les regarder de mémoire. La promenade dans les couloirs du Louvre est donc bien présente dans ce court roman, bien maîtrisé.

Un superbe roman pour ceux qui s'intéressent à l'art, à l'histoire et à la féminité.


Une note ...
4/5


" Risquer sa vie, sans orgueil, pour un sourire peint il y a un demi-millénaire, cela se peut ? " 

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